Lapins - 100 x 100 cm. - 2021.
C'est juste après la tartine beurrée, quand on a vidé le bol... Alors on va "aux lapins". On s'empresse de prendre le seau à épluchures, on rajoute le pain de la veille, on inspecte la cuisine en quête de trognons dévoyés.
L'approche est prudente mais empressée. Il faut ouvrir la cage doucement, sans brusquerie, en retenant son souffle. Surtout ne pas les affoler. Il ne faut pas qu'ils sursautent. Ils sont là dans la pénombre, l’œil brillant, la frimousse tremblante, prêts à bondir, figés dans une attente fébrile...
Brusquement ils s'égayent dans une tambourinade folle. Alors on sort du seau, feuilles de salades, rafles de radis, copeaux de betteraves, carottes chanceuses... On complète par de la luzerne, on invite les plus intrépides. Dans l'hésitation on confond abreuvoir et mangeoire. Une poignée de granulé, du spécial lapin bien entendu. Une dernière approche hésitante, une caresse furtive, un souvenir de fourrure fuyante... On referme la porte précautionneusement, on recompte...
JLT
Canal du midi - 150 x 150 cm. - 2012.
Offert Mairie d'Homps - 11200.
En ce temps là, le canal était errance...
Les poissons nageaient dans les branches.
L'ombre des platanes n'est plus qu'un souvenir lointain,
une tricherie de carte postale,
une ritournelle de carpe poisseuse,
un cancan de canard rabâcheur.
JLT
La plage - 150 x 150 cm. - 2014.
Profiter de l'instant autant que de la crème solaire. La rentrée attendra, les mails également. On montrera la photo aux collègues blafards partis chasser le moustique en Laponie.
Le parasol s'impose royalement au milieu des serviettes polychromes. Les enfants sautent dans l'écume bouillonnante. L'eau est à 23 degrés. Et puis on est pas seul... On lit nonchalamment sur un coude, en changeant sans arrêt de côté. Sinon il faut s'asseoir soleil de dos, ou bien s'allonger et tendre les bras vers le ciel. C'est l'histoire d'un homme qui voudrait tuer son chef de service et qui est amoureux de la comptable... Mais la comptable s'est entichée de la secrétaire du chef de service.
Sur la plage on se tolère, il n'y a pas d'envie de meurtre. C'est bien aussi avec un magazine, à condition qu'il ne soit pas people. C'est encore mieux de faire semblant, et de lorgner derrière des verres foncés, la silhouette avantageuse de deux colocataires providentielles venues s'échouer à quelques décimètres. Peut-être vont-elles ôter le superflu pour ne garder que l'essentiel.
Il y a même un avion qui traîne une banderole dans le ciel.
Ce soir soirée disco au "Barberousse".
JLT
La plage de Mateille - 150 x 150 cm. - 2014.
Offert - service neurochirurgie - hôpital Purpan Toulouse.
Coquelicots - 120 x 120 cm. - 2014.
Offert - service neurochirurgie - hôpital Purpan Toulouse.
Paysage - 92 x 74 cm. - 2020.
Paysage - 50 x 50 cm. - 2020.
Amandier 61 x 50 cm. - 2019.
L'Aveyron - 120 x 120 cm. - 2018.
Offert à Jeanine & Roland.
Ce 15 août aurait pu être bien pire. C'est le hasard qui nous a conduit ici. Il n'y a pas beaucoup de place, mais là sur la berge on sera bien. Et il y a de l'ombre. L'eau verte glisse en silence, déversant son train de canoës. Il règne une atmosphère à la Brueghel. Chacun s'approprie un espace restreint pour l'occuper pleinement, tout en laissant une distance de bienséance. Une zone de pudeur que l'on empiète prestement en s'excusant du bout des lèvres, en évitant d'écraser la queue du chien ou les sandales du voisin.
C'est une plage comme tant d'autres au bord de l'Aveyron, où la quiétude est intergénérationnelle, où les parties de scrabble s'enchaînent au fil de l'eau.
On regarde couler la rivière comme on regarde passer un train. Le train de la vie, de la douceur de vivre, de l'exultation retenue. Il est des rivages où la sérénité s'étale nonchalamment sur la grève, ou le stress de l'après sieste s'évapore dans l'air vibrant.
- Oh, tu as vu...! Il y a un chien dans le canoë...!
On envoie un selfie aux collègues malchanceux empêtrés dans la torpeur de vacances suffocantes et qui vous retournent illico, une vue du Mont Blanc, une assiette de fruits de mer, une chope de bière embuée...
Ce 15 Août aurait pu être bien pire...
JLT.
Le Café de la Poste - 50 x 50 cm. - 2023.
D'ordinaire on passe devant mais aujourd'hui on s'arrête. On vient à la terrasse du Café de la Poste pour s'asseoir, se balancer à l'ombre des platanes, écouter les discussions des tables voisines, se bercer de vacuité... A la terrasse du Café de la Poste on s'extrait du tumulte, on fait rupture, on attend, suspendu, nonchalant, au fil de l'eau... On attend que le serveur vienne prendre commande, qu'il nous porte notre rafraîchissement. On attend que Rostropovitch vienne nous jouer une suite de Bach. Une suite qui nous bercera comme une brise légère, nous rafraîchira, nous bichonnera. A l'embarcadère de notre rêverie on écoute distraitement les conversations flotter.
- Tu crois que ce sont des Russes qu'il y a à côté ?
Le serveur alterne humour approximatif et anglais.
- Et pour le chien ce sera... ?
A la croisée des circulades et de la rue principale, le Café de la Poste fleure bon la douceur de vivre. Ce n'est pas par hasard que le monument aux morts est venu s'installer tout près.
La bière a un goût mielleux, on boit à petites lichettes, on laisse la mousse s'évaporer... Rien ne presse quand on vient au Café de la Poste. Il fait bon s'installer douillettement, se déconnecter, s'alanguir dans les fauteuils d'osier, laisser le regard flotter, à l'ombre de Cézanne et de Manet.
L'Europe est née au Café de la Poste. Ici on parle Anglais, Allemand, Espagnol, tout comme aux écluses voisines, mais sans engueulade.
D'ordinaire, on passe devant, mais aujourd'hui on s'est assis. C'était comme une invitation, une tentation, une gourmandise.
- Je crois que Rostropovitch ne viendra pas... On rentre, je préparerai le barbecue...
JLT.